Rose et Rapine article de Noorbergen

Fabien Claude – ROSE ET RAPINE

Les vrais grands peintres, de Fabien Claude à Gérard Titus-Carmel, savent écrire, et parfois remarquablement. Dans la lignée de la plus haute écriture, celle des aphorismes, Fabien Claude, aux confins des attendus du genre, brûle la parole poétique et secoue les évidences langagières. Chaque phrase d’une terrible densité écourtée est une secousse verbale. Il s’agit pour ce peintre de l’âpreté et de la tension d’“Intensifier l’obscur“, “La tête fendue par un orage de boue.

Beau peintre, Fabien Claude, qui vit et œuvre à Metz, écrit depuis longtemps. Son écriture fine et décalée s’approche parfois grands aphorismes elliptiques de René Char ou de Michaux. Ainsi, en quatre mots aigus : “Voix d’orage n’articule pas“. Mise en déroute des siestes mentales, et des ordres du monde… Et jamais le langage ne se referme, dans l’échéance toujours repoussée de la paix des mots-maux. La tyrannie du sens n’est pas son fort.

Chaque courte phrase, ciselée au scalpel, ouvre un territoire mental où la parole attendue a disparu. D’intensité maximale, chaque vocable est d’éclair verbal, et plus proche de l’impossible non-dit que du dire que du pensable reposant. Lecture exigeante, donc, et très heureusement. Ses mots, rares et décantés, font demeure nue aux écarts du monde. Fabien Claude crée de l’altérité verbale à chacune de ses paroles. Il s’agit pour lui de “Lancer des flèches au lieu de construire“, dans l’espace ouvert de l’autre pensée.

Christian Noorbergen, le 22 septembre 2023

Aralya